Enfants branchés et cyber-espace

Retour aux articles

Date de publication

mercredi 01 février, 2006

Ressource

Louise Labrecque

Tout va très vite sur la planète Internet. En effet, cet espace social ouvert sur tous les possibles suscite chez l’enfant, déjà curieux par essence, un goût d’exploration sans limites.

 

 

L’accessibilité grandissante des ordinateurs, la fonction éducative de certains sites, la panoplie de jeux et de moteurs de recherche expliquent la popularité d’Internet auprès des enfants, un nouveau phénomène de société qui prend de plus en plus d’ampleur et touche les enfants de plus en plus jeunes. Manga, Jin-gli, Vincent, Noor-anh et Alexandra sont de ceux-là, figures de leur génération.

 

L’urbanisation croissante de la société a provoqué, par l’accès à l’éducation et la télévision, une évolution des mentalités et des comportements. Le phénomène Internet à son tour favorise une mutation sociale et amène son lot de questionnements et d’analyses, en particulier lorsqu’il s’agit des jeunes enfants. Le Net suscite le même débat que la télévision, renvoie aux mêmes questionnements, mais avec encore plus d’acuité, tant il suppose un espace libre au cœur des apprentissages. Les jeunes esprits de demain ont soif de connaissances et l’espace démocratique – l’éthique du Net – crée un lieu de communication sans précédent où s’articule une véritable conscience sociale individuelle. Certes, mais les dangers d’Internet, parlons-en ! En effet, ils existent et les enfants tout particulièrement peuvent être vulnérables; il est important d’en prendre bonne note. Tout est question d’éducation. L’enfant sait qu’à quelques clics de souris se trouvent des sites de violence, de pornographie, mais aussi des sites d’archéologie, de littérature, de jeux logico-mathématiques ainsi que des sites expliquant par exemple comment fabriquer un vivarium ou identifier les arbres de la forêt laurentienne. Tout comme le monde réel, le monde virtuel comporte des dangers et, par rapport à ce dernier, nous devons demeurer vigilants et effectuer un travail d’éducation en discutant avec nos enfants de leurs découvertes, en les accompagnant dans leur navigation, bref en nous intéressant à leurs trouvailles et en évoluant avec eux dans la connaissance informatique. Une fois la réalité du Net bien expliqué aux enfants, il est important d’y associer des mesures de protection : il existe des mots de passe pour bloquer l’accès à certains sites (avec Windows XP) et pouvant assurer la sécurité de la navigation des petits lorsque nous ne pouvons être tout près d’eux. « Vincent est tellement heureux lorsqu’il navigue sur le Net, il y trouve des réponses à toutes ses questions et ses travaux d’école sont extraordinaires », explique sa maman. En effet, comme un immense sac à trouvailles, le Web regorge de merveilles, les moteurs de recherche sont de plus en plus nombreux et efficaces. Les enfants ont une longueur d’avance sur bien des adultes dans l’acquisition d’habiletés spécifiques aux technologies. D’après une étude américaine, ces enfants, que l’on nomme digital natives, ont déjà un mode de perception différent de leurs prédécesseurs, ils bougent même différemment dans l’espace et envisagent le monde d’une façon qui appartient déjà à un futur dont nous ignorons les paramètres. Science-fiction ? Non, c’est bien de réalité virtuelle dont il est question. Les jeux vidéo, les représentations en trois dimensions, les logiciels de reconnaissance vocale, toutes ces technologies sont en train d’entrer durablement dans nos vies pour créer une mutation collective et individuelle.

 

La génération numérique ou les digital natives sont des enfants « natifs de ». Ce néologisme renvoie à une notion de territoire. Cela n’est pas sans intérêt compte tenu du fait que, justement, le Net fait de notre planète notre maison. Le territoire n’est plus morcelé, mais forme une structure, voire une entité, globale. L’enfant a une vision plus large sur le monde. En effet, dès l’âge de deux ans, Manga faisait la différence entre la télévision et l’ordinateur et ne comprenait pas pourquoi on ne pouvait pas revenir en arrière sur l’image avec la télévision. Pour lui, l’ordinateur a toujours existé. Et contrairement à la télévision, d’abord en noir et blanc, avec des « oreilles de lapin » et de la neige en fond d’écran, l’ordinateur a ceci de stupéfiant : il s’agit d’une fenêtre interactive sur le monde . L’enfant peut envoyer et recevoir des courriels, il peut parler en temps réel avec ses amis et sa famille, échanger des photos et de la musique, en plus de jouer – et même de naviguer – avec des amis. Alexandra a huit ans et elle aime l’ordinateur, mais elle est soumise à des règles strictes à la maison : jamais le soir après le souper et surtout jamais le dimanche, jour où elle va chez ses grands-parents. D’ailleurs, ses grands-parents et elle ont des conversations très intéressantes à ce sujet. Le choc des générations est amusant pour cette dernière et elle apprend beaucoup de choses simplement à partager ses conversations familiales. « Papy n’avait pas d’ordinateur et de télévision lorsqu’il était jeune », me dit-elle avec un ton solennel. En effet, il n’y a pas si longtemps, le monde était complètement différent. Ce sont des heures de plaisir à raconter des anecdotes en famille et à observer la beauté de l’affaire : la société et l’être humain évoluent et ils sont en marche pour marquer l’histoire avec l’avènement informatique.

 

1Réseau : le magazine de l’Université du Québec « Cyberkids : une autre planète? » automne 2004 2 Jocelyne Valois, Sociologie de la famille, Montréal, CEC collégial et universitaire, 1993, 333 p.